CAN 2021 : Sénégal, troisième tentative !

CAN 2021 : Sénégal, troisième tentative !

Vaincre la malédiction : Aliou Cissé tentera dimanche en finale contre l'Egypte de remporter pour la troisième fois une Coupe d'Afrique avec le Sénégal, après en avoir perdu une en tant que joueur et une en tant qu'entraîneur.

Cette question revenait à chaque rencontre avec les médias. Avec encore plus d'acuité à mesure que la finale approchait. Maintenant, il est là. Il a toujours répondu gentiment, même si à chaque fois de cruels souvenirs remontent à la surface : son penalty raté en 2002 (0-0, 3-2 T.a.b. pour le Cameroun), la finale perdue par un gag de but contre l'Algérie en 2019 (1-0). "Nous avons la chance de faire partie de cette génération qui peut gagner, c'est une motivation, un marathon : croire qu'à la fin, la lumière sera là", a déclaré celui qui a été la cible de flèches de la presse sénégalaise depuis son arrivée il y a six ans.

"Le problème d'Aliou, c'est qu'il a été critiqué dès le début", a expliqué à l'AFP Claude Le Roy, sélectionneur du Sénégal de 1988 à 1990. "Il n'avait aucune légitimité pour la plupart des Sénégalais et cela a continué de manière incompréhensible malgré ses résultats". "Et s'il ne gagne pas la finale, ce sera terrible", a ajouté l'entraîneur aux neuf CAN jouées. "Les gens ne pensent qu'à la victoire, mais le football, c'est bien plus que ça : il a fait ce qu'il a fait, c'est-à-dire maintenir le Sénégal au plus haut niveau, ce qui est déjà un exploit", a ajouté Le Roy.

Cissé "a mis de l'ordre, il n'a jamais été contesté en interne, mais qu'il soit mis en cause de cette manière par l'opinion publique, je trouve cela tellement injuste". Le consultant de Canal Plus Afrique se souvient : "Pendant 20 ans, le Sénégal ne s'était jamais qualifié pour une Coupe d'Afrique" (une seule participation entre 1970 et 1990, ndlr). "Quand je suis arrivé, ils avaient tellement honte de leur équipe qu'ils ne l'avaient même pas sélectionnée pour les éliminatoires de la Coupe du monde 1990 ! Il faut avoir un peu de mémoire !" Cissé lui-même défend son bilan : "S'il y a une progression internationale en six ans, le Sénégal en fait partie", souligne-t-il. "Nous étions 14e en Afrique et 64e au classement Fifa quand je suis arrivé, aujourd'hui nous sommes premiers sur le continent et dans le top 20 mondial".

"La critique, c'est la fonction, c'est comme ça, celui qui vient après moi la goûtera aussi", philosophe-t-il. "Il ne faut pas tout prendre au premier degré, il faut savoir prendre du recul et faire le dos rond. Et puis il faut savoir se remettre en question", concède-t-il. "Il faut accepter que l'équipe nationale ne m'appartient pas, que 17 millions de Sénégalais ont leur mot à dire et les journalistes aussi", ajoute Cissé. En conférence de presse, les médias ont même loué ses choix tactiques, et Cissé s'en est amusé : "En six ans, tu n'as fait que me taper dessus, Gomis, ce compliment me va droit au cœur", a-t-il déclaré après le quart de finale contre la Guinée équatoriale (3-1).

"Le Sénégal a tout maîtrisé", a souligné Le Roy. "Aliou a fait les changements tactiques qui s'imposaient, ses changements ont été bons. En demi-finale (3-1 contre le Burkina-Faso), il a sorti Pape Gueye pour Kouyaté, c'était évident, il a beaucoup plus percuté". En quart de finale, "Boulaye Dia n'a pas été très efficace, dès qu'Ismaïla Sarr est entrée, le jeu a changé, Aliou a eu raison à chaque fois qu'il a fait des changements", a ajouté Le Roy. "Ce travail ne pourra être couronné que si cette génération remporte un trophée", nuance Cissé, "on court derrière depuis 1960, avec de très belles générations qui sont passées sans y arriver". Cissé pense avoir le "privilège" de faire partie de ceux "qui peuvent écrire l'histoire de leur pays dans le football" et rêve de ramener enfin un trophée : "On n'est pas venu pour jouer une finale, mais pour en gagner une". Enfin.